• "Les chemins qui vont à la mer..."

    C'était au temps où l'automobile avait dépassé le simple stade d'invention pour devenir symbole de bon goût, au même titre qu'une robe de couturier. Et les berlines et leurs chauffeurs promenaient moustaches en guidons et bottines à boutons de la caste la plus dégagée des contraintes matérielles vers les villas d'une plage en vogue.

    De ces maisons aux entrelacs forgés, aux vitraux fleuris, descendaient d'étroits escaliers, à deux pas du sable fin. Là, sous la dentelle des ombrelles, les regards se tournaient vers un horizon brumeux dont ni Debussy ni Ravel n'auraient renié les ondes.

    Paris-Deauville, les malles des autos remplies pour un week-end des envies d'évasion, gavées au retour de folies et d'air pur... Liberté d'un début de siècle où les rêves s'épanouissaient, comme les kilomètres sous les roues des Delage, Bugatti ou autres Voisin, entre un casino et un concours d'élégance.

    Etrange époque aux lignes pures et délicates où les carrosseries « habillaient » les chassis comme les robes leurs conductrices, quitte à être parfois dessinées par la même personne (pensons à Sonia Delaunay), et où même le chantre du fonctionnalisme se laissa aller à produire des voitures aux carrosseries d'un écossais parfaitement assorti à leur intérieur...

    Lorsque vos yeux se poseront sur les reflets d'un de ces longs capots sous les spots d'une vitrine, prenez bien le temps de goûter cette atmosphère passée, ornée de volutes et de courbes, et que « Les Chemins de l'Amour », charmante quoique légèrement anachronique petite valse de Poulenc, pourrait illustrer, si vous avez envie de l'écouter...


    « Les chemins qui vont à la mer
    Ont gardé de notre passage,
    Des fleurs effeuillées
    Et l'écho sous leurs arbres
    De nos deux rires clairs.
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